Aujourd’hui, vendredi 28 juin 2019, l’équipe de France féminine de football joue son 1/4 de finale face à l’équipe des USA, N°1 mondial, plusieurs fois championne du monde et tenante du titre suprême.
Comme, depuis trois jours, nous vous proposons de retrouver des articles figurants dans le numéro papier de Mai/juin, de « FemmeS du Monde magazine », qui était principalement consacré à cette coupe du monde de football féminin et dont l’interview que Mme Brigitte Henriques, vice-présidente de la Fédération Française de Football – et chargée du développement du football féminin – a eu la grande gentillesse de nous donner, était le « point fort », quelle meilleure occasion pour vous proposer cet article, à présent, sur le site de « FemmeS du Monde magazine?
A noter, tout de même, que, contrairement aux éditos mode que nous vous avons proposés, extraits du dernier numéro papier, cette interview vous est proposé dans une présentation adaptée au présent support – vous présenter les 5 pages (même mis en format « plein écran » auraient rendu la lecture de ladite interview laborieuse). Malgré tout, c’est bien la même interview, dans son intégralité, avec les mêmes photos que dans la version papier, que nous vous offrons ici.
20 mai 2019 : nous arrivons aux bureaux de la Fédération Française de Football, pour y rencontrer Mme Brigitte Henriques, la vice présidente de la F.F.F. – également chargée du développement du football féminin, depuis 2011 -, afin de l’interviewer, comme elle l’avait accepté, dès l’instant de notre demande, tout juste une semaine plus tôt, au téléphone.
Pourtant très chargée de travail, Mme Henriques prend le temps de nous recevoir – et ce, très chaleureusement -, avant une réunion importante, pendant une demie heure. Le temps d’échanger, avant de passer à l’interview et l’heure de sa réunion très importante était déjà venue. Mais Brigitte Henriques, en plus d’être une femme tout ce qu’il y a de plus capable, est de ce que l’on peut appeler les « Grandes dames ».
Nous faisant passer, le temps de sa réunion, dans le bureau à côté du sien – et qui n’est autre que celui que partage l’une des plus grandes joueuses française de l’hisoire du football, Laura Georges (devenue secrétaire générale de la F.F.F.), avec Mr Gemrrich, le président de la Ligue d’Alsace Lorraine et non moins grand nom du football français de la « génération Platini » -, MADAME Henriques nous y rejoint sitôt sa réunion, finie, afin de nous accorder cette interview exclusive, « riche et généreuse », que nous avons, d’autant plus plaisir à vous livrer, à présent, pour ce « spécial France 2019 », de ce numéro de « FemmeS du Monde magazine ».
Christian Estevez
« C’était un moment opportun pour candidater ».
Christian Estevez : Madame Henriques, bonjour ! Tout d’abord, merci de nous accueillir dans les locaux de la F.F.F. . Nous sommes à quelques encablures du début de la coupe du monde et j’aurais aimé pouvoir revenir, avec vous, tout d’abord sur comment est née la candidature de la France à la coupe du monde ? De quelle(s) initiative(s) ? Comment cela s’est présenté au départ ?
Brigitte Henriques : Alors, en fait, on va revenir un petit peu en amont, vis à vis de cette décision là. Lorsque Noël Le Graët a été élu, avec son équipe, en 2011, il a vraiment voulu faire du football féminin sa priorité. Ce qui fait que, les quatre premières années (de 2011 à 2015-2016), il y a vraiment eu des moyens conséquents qui ont été donnés – que ce soit des moyens humains ou des moyens financiers. Et, surtout, cela faisait parti du programme fédéral. C’est à dire que toutes les directions avaient ce sujet-là, du football féminin, à traiter, alors que, avant, c’était plutôt « quand on avait le temps », « quand on était dispo ». Alors que, là, vraiment, c’était une priorité.
De ce fait, très vite, nous avons pu mettre beaucoup d’actions en place. Emmener, aussi, les élus avec nous, les délégués des districts (puisque vous savez que ce sont eux qui animent les clubs). Et, aussi, parce que Noël Le Graët à montré l’exemple en nommant des femmes à des postes importants – montrant que la mixité avait aussi sa place dans le football -, ça a permis d’enclencher les choses.
Et donc, du coup, dès janvier 2016, nous sommes passés à 100 000 licenciées, alors que nous n’étions que 50 000 en 2011. Et comme nous avions pris le parti pris de dire que, si nous étions présentes physiquement, ça permettait de montrer que, si avant, nous ne faisons pas parti du paysage, là, c’était bien car ça permettait d’avoir plus de femmes bénévoles dans les clubs, de l’encadrement, des arbitres, c’était bénéfique, pour les clubs, d’avoir cette mixité. Du coup, nous sommes, aussi, passées de 25 000 à 40 000 dirigeantes. De 1300 à 3 000 éducatrices. Et de 600 arbitres à presque 1 000, aujourd’hui.
Donc, cela, c’était vraiment la première étape. Ce qui fait que, à mi-chemin (de 2011 jusque, à peu près, 2014), les chiffres bougeaient vraiment beaucoup, c’est le président Le Graët qui a pris cette initiative, en arrivant au COMEX (« comité exécutif » – NDLR), un jour, en disant «Voilà, il faut que l’on candidate pour la coupe du monde féminine en 2019, puisque nous sommes entrain de rattraper notre retard, ça va être une véritable opportunité de donner un deuxième coup d’accélérateur. Et, en fait, surtout, c’est le moment. On a organisé l’Euro 2016. On sait faire. On a organisé « France 98 », on sait faire. Et, vu la rotation des continents pour l’organisation des coupes du monde, si nous ne le faisons pas pour 2019, ça ne reviendrait plus. Le fait d’organiser une coupe du monde, et d’avoir eu l’Euro, il n’y aurait plus d’événement de football possible, en France, avant cinquante ans.
C’était donc pour toutes ces raisons que c’était un moment opportun pour candidater.
« Nous voulions que ce soit vraiment une coupe du monde festive et populaire, accessible à tout le monde ».
C.E. : Comment avez-vous travaillé le projet ? Vous avez d’abord fixé des critères, des buts, des objectifs… ?
B.H. : Ce qui était déjà très important, c’était d’avoir une vision. Comme nous savions que le premier mandat nous permettait de rattraper notre retard, on a fixé des objectifs par rapport à l’héritage qui serait laissé – ce qui était, déjà, très très important.
Nous sommes, aujourd’hui, à 180 000 licenciées et voulons dépasser le cap des 200 000 après la coupe du monde. Nous voulons, bien évidement, augmenter le nombre de femmes éducatrices, d’équipes, de clubs qui accueillent. Pour cela, nous sommes toujours sur la même politique de développement qu’auparavant.
Après, ce que nous voulions, en terme d’organisation, c’était un événement qui rayonne vraiment sur l’ensemble du territoire (nous ne voulions pas qu’un seul site). Nous avons, alors, choisi onze villes prénommées pour les candidatures, avec l’expérience que nous avions du remplissage des stades, depuis 2011, et de voir si le public répondait présent ou pas.
Et, aussi, bien évidement, de voir sur quels territoires. Nous étions sur des « terres de foot » et sur une belle évolution du football féminin. Parce que l’on sait que, à l’inverse d’un « Euro 2016 », là, il n’y a pas de tirage au sort des billets. Les spectateurs il faut aller les chercher. Il y a 52 matchs à remplir, avec des jauges de 20 000, 25 000, 40 000 et même encore 45 000 pour Lyon.
C’est donc une stratégie qui est complètement différente que sur un événement des garçons. Et donc, pour choisir les onze villes prénommées, c’était, en terme stratégiques, de savoir où la Coupe du Monde allait prendre et où les stades pouvaient être remplis. Et, comme à la date d’aujourd’hui, on sait que l’on a vendu 780 000 billets sur 1 300 000, nous savons que nous ne nous sommes pas trompé sur cela. Mais également sur la politique tarifaire, puisque la place est à partir de 9€. Nous voulions que ce soit vraiment une coupe du monde festive et populaire, accessible à tout le monde.
Afin de choisir les 9 villes sur les 11 candidates, nous avions des objectifs très clairs. leur avons demandé de quelle manière ils allaient se servir de cet événement comme un levier des politiques publiques et comment cela allait être plus qu’un événement sportif, pour faire bouger les lignes dans la société sur : la mixité, l’inclusion, le développement du sport féminin, sur les politiques de quartiers. Et ça, vraiment, les élus l’ont bien compris. Ils étaient jugés, aussi, sur cette partie là.
Après, il y avait, également, tout ce qui est sur l’environnement durable, puisque nous avons signé la charte des 15 engagements éco-responsables des grands événements sportifs, avec le ministère. Il y a donc, aussi, un héritage sur l’environnement durable qui a compté parmi les critères. Ensuite, il y avait les jauges. Comme se sont des jauges, nous ne pouvions pas, non plus, aller jouer partout. Et, enfin, ce qui était aussi important, c’était la qualité d’organisation, tant de la ville que des prestataires, des opérateurs, des stades qui ont été sollicités pour que toute cette synergie puisse se mettre en place, avec Erwan Le Prévost, directeur général du LOC (« Comité d ‘Organisation Local » en français – NDLR), ou encore, Erwan Paquet, qui est le directeur du tournoi.
A partir de tout cela, nous avons monté un dossier de candidature pour organiser la coupe du monde, avec des forces. En disant que l’on avait un savoir-faire. En disant que nous étions dans un territoire où les choses étaient entrain de bouger par rapport au football féminin. Donc, qu’il y avait une dynamique. Elle n’était pas à créer… Elle existait déjà et qu’en fait, elle allait permettre d’en créer une seconde, avec un second souffle. Tout cela constituait nos forces.
Et, l’autre élément qui, je pense, était bien, dans notre dossier de candidature, c’était que l’on candidate aussi pour la coupe du monde des moins de 20 ans. Et l’on a pu voir que, avant, la logique de la FIFA était que l’on répète la logique de la coupe du monde des moins de 20 ans sur les grands stades qui, malheureusement, sur les moins de 20 ans, sont vides. Et, là, Noël Le Graët avait dit « Il faut que l’on demande à faire ça sur une région, sur une terre de foot, avec des stades beaucoup plus petits (avec des jauges de 4 à 5 000 places – ou 1 500 sur certains matchs), et que les stades soient remplis, et que cela soit vraiment de très très grande qualité. Et, en fait, c’est le pari que l’on a gagné puisque les stades étaient remplis, tous les billets ont été vendus, les gens ont vu une compétion de qualité, une équipe du Japon qui a remporté le trophée avec un jeu qui était une leçon, tellement il était attractif, et puis l’héritage qui a été particulièrement fructueux pour la ligue de Bretagne puisque, non seulement, elle a augmenté le nombre de licenciées, mais, aussi, les stades qui ont été choisi (comme Concarneau, Dinan – Léon), ont complètement été rénovés, avec des pelouses toutes neuves. Nous avons aussi, du coup, formé les jardiniers de ces pelouses là, avec la FIFA et le LOC.
Sur cet aspect-là, nous avons, vraiment été précurseurs, en disant à la FIFA « Faisons plus petit mais mieux »…Et je pense que nous avons réussi.

« A partir du moment où l’on « me donne les clés du camion », je n’ai jamais de doutes ».
C.E. : Vous avez personnellement porté ce projet de candidature. Comment l’avez-vous vécu ? Il y a eu des moments de doutes, des moments d’euphorie ?
B.H. : Alors, dans les projets qui sont les miens, à partir du moment où l’on « me donne les clés du camion », je n’ai jamais de doutes. Parce qu’il ne faut pas avoir de doutes si l’on veut réussir. Çà a été, surtout, beaucoup de travail avec les équipes de la fédération. Il y a vraiment beaucoup de personnes qui sont vraiment très compétentes. Donc, non, moi, personnellement, je n’ai jamais eu de doutes parce que, je savais que c’était un projet ambitieux, mais que la volonté politique de Noël Le Graët, et les compétences qu’il y a ici, à la fédération française de football, faisaient que c’était quelque chose que l’on pouvait réussir.
Après, le vrai défi que nous avions – mais aussi la grosse responsabilité -, sur cette coupe du monde, c’était de remplir les stades. Et donc, la seule « pression » que nous avions, qui était de remplir des stades de 20 000 à 25 000 avec des équipes qui ne sont pas l’équipe de France, nous ne l’avions jamais fait. C’était donc une véritable responsabilité, mais, aussi, un challenge. Et c’est l’un des challenges que j’ai le plus aimé, parce que, du coup, vraiment fallut fédérer tout le monde autour de ce projet là – que ce soit les familles du football, mais aussi les villes hôtes. Ca c’est de la politique, et c’est même de la politique de proximité, de la politique de conviction, et de la politique d’adhésion, pour faire adhérer les gens à une vision, à un projet. Et, vraiment, j’ai reçu beaucoup beaucoup d’envie, d’enthousiasme, de la part de mes interlocuteurs (que ce soit les élus des villes – je pourrais tous vous les citer car ils ont, franchement, vraiment tous adhérer au projet, pour que ce soit plus qu’un événement sportif, y mettant des moyens conséquents pour mobiliser leur territoire depuis deux ans. Ils ont mis plein d’actions en place, de communication, d’animation, etc… Et, là, depuis le mois de septembre, on a fait trois fois le tour de France pour permettre à nos familles du football de se mobiliser (parce que l’on a, tout de même, plus de 2 millions de licenciés et plus de 16 000 clubs). Et, là, c’est pareil. Nous avons réuni 40 à 50 personnes à chaque fois que nous nous déplacions sur le territoire, pour leur donner envie, pour leur dire qu’ils allaient avoir un héritage et qu’ils avaient des choses à gagner – et qu cela allait être vraiment génial -, et c’est vrai que c’est du bonheur absolu de voir le répondant qu’il y a pu avoir, même si c’était un travail de fourmi.
Mais, moi, je me suis vraiment régalé et, là, je sens que l’on porte vraiment les fruits de tout ce travail-là, puisque, aujourd’hui, nous avons 7 matchs à guichets fermés – on en aura peut être dix la semaine prochaine. Et, avec les équipes du comité local d’organisation, on a travaillé dur, on a encore dur à travailler – car le plus dur reste à venir -, mais je pense que, sur ce challenge-là, c’est plutôt pas mal parti.
« Le fait qu’il y ai une coupe du monde en France, pour moi, c’est plus qu’un rêve. »
C.E. : Est-ce que, le fait que, dans votre carrière personnelle de joueuse, vous n’ayez pas pu participer à cette compétition internationale, en 1996, vous a donné une motivation supplémentaire, vous disant « Je n’ai pas pu participer à une, du coup, je vais faire participer à une, dans mon pays » ?
B.H. : En fait, ce n’est pas que pour la coupe du monde. Comme je disais encore ce matin, à ma fille aînée qui a 18 ans, « Moi ce n’est pas un travail que j’ai ici. C’est une cause ». Je le disais encore, hier, à des jeunes filles, dans un événement où il y avait 1 600 personnes (des gamines qui jouaient toute la journée, sur la plage, à Saint-Brevin-les-Pins (Loire Atlantique – NDLR), dans le cadre d’une mobilisation pour la coupe du monde 2019) : « Vous avez « trop de la chance », parce que, nous, à notre époque, il n’y avait pas de club qui nous accueillait. Nous ne pouvions jouer que, un peu, dans la cour d’école, lorsque nous étions acceptées, ou, un peu, dans les terrains vagues, avec nos frères. Mais, ça, nous ne pouvions pas le faire. ». Et, ça, aujourd’hui, depuis que je suis à la fédération, depuis 2011, c’est ça qui m’anime. Toute mon histoire me permet de puiser toute la détermination la pugnacité, la force de conviction. Parce que, en fait, on veut juste un truc qui est que, toutes les jeunes filles qui sont passionnées de football, elles puissent vivre des événements comme ça, au plus au niveau de pratique professionnelle. Et, là, le fait qu’il y ai une coupe du monde en France, pour moi, c’est plus qu’un rêve. C’est comme si c’était l’accomplissement d’une « mission de vie », un peu.

« Noël Le Graët à chois Corinne Diacre parce qu’il sait qu’elle a les épaules pour supporter cette pression ».
C.E. : Si l’on parle, un peu, de l’équipe de France, elle-même, dans « sa » coupe du monde. Il y a une forte pression. Quel est le lien, entre vous – et la F.F.F. en général -, avec Corinne Diacre (la sélectionneuse de l’équipe de France – NDLR), pour gérer cette pression ?
B.H. : Noël Le Graët à chois Corinne Diacre parce qu’il sait qu’elle a les épaules pour supporter cette pression qui est, quand même, particulièrement positive (on vient de gagner la coupe du monde masculine 2018. Là, on sait que nos stades se remplissent – on va avoir le public avec nous, ce qui est juste extraordinaire de voir toutes ces ondes positives qui vont être présentes). Vous savez, Corinne Diacre a été choisie parce qu’elle a les compétences pour avoir cette posture-là. Et puis, surtout, elle sait encadrer, aussi, avec un « staff » de qualité.
Autant, nous préparons tout sur l’organisation minutieusement, dans les moindres détails. Et bien, Corinne Diacre, elle fait exactement la même chose sur sa partie, qu’est la partie « football ». Et, vraiment, elle sait exactement ce qu’elle fait. Elle maîtrise son sujet.
« Cette équipe de France, je la connais bien. »
C.E. : Alors, justement, cette équipe de France, vous la voyer comment, à l’heure actuelle ? « Bien », je suppose.
B.H. : Cette équipe de France, je la connais bien. Moi, j’y étais en 1988 – j’avais 17 ans. Et puis, là, je les suis depuis 2011. Donc, je vois vraiment les équipes tourner au fur et à mesure. Là, on arrive dans une transition. A l’Euro 2017, la génération dorée (celle de Sonia Bompastor, Camille Abily, Laura George, Elodie Thomis…toutes ces grandes joueuses qui ont juste un palmarès incroyable) commençait à arrêter. Et l’on a, dans le même temps, les jeunes joueuses qui ont été énormément titrées – Griedge Mbock, championne du monde, championne d’Europe, ainsi que Kadidiatou Diani, Aïssatou Tounkara, pour ne citer que quelque unes -, sont des joueuses qui ont un palmarès incroyable pour leur âge. Et ce mélange – puisqu’il reste des joueuses comme Gaêtane Thiney, Elise Boussaglia, Sarah Bouhaddi, Amandine Henry, Eugenie Le Sommer -, ça fait une bonne alchimie pour créer un collectif à l’image de ce que Corinne Diacre veut faire.

« Ça va être très très dur, mais on le sait. C’est une coupe du monde ».
C.E. : Vous sentez la victoire possible pour cette équipe de France ?
B.H. : Forcément ! Quand on est le pays organisateur, on ne rêve que d’une chose : gagner la coupe du monde. Donc, évidement que l’on est obligé de l’imaginer. Après, on sait que ça ne va pas nous « tomber tout cuit dans le bec ». Il faut prendre chaque match, l’un après l’autre. Ça va être très très dur, mais on le sait. C’est une coupe du monde. Il faut être très très fortes à tous les matchs, les uns après les autres. Et pour aller au bout, il va falloir être plus fortes que toutes les autres équipes. Donc il faut être les plus fortes dans tous les domaines.
« Les Etats-Unis, c’est, tout de même, une équipe « en transition », comme beaucoup d’autres ».
C.E. : Si l’on met de côté l’équipe de France, quelles sont vos favorites ? Aussi bien celles « de cœur », mais, aussi, entant que technicienne, connaisseuse du football féminin.
B.H. : Forcément les États-Unis, parce qu’ils sont champion du monde en titre et que l’on sait que, les joueuses des États-Unis, en mode « complétion » ce sont des « winneuses » incroyables – elles ont une mentalité de gagneuses qui est, juste, impressionnant. Après, c’est, tout de même, une équipe « en transition », comme beaucoup d’autres. Il y a aussi l’Allemagne qui est « en transition », mais, l’Allemagne, on cornait toute ses qualités, c’est une équipe toujours très compétitive. Il y a, également, l’Angleterre, qui monte crescendo – la fédération anglaise à mis pas mal de moyens, depuis un bon moment et l’on voit bien que les joueuses progressent considérablement, notamment, athlétiquement, et qu’elles jouent, tactiquement, beaucoup mieux qu’avant. Voilà déjà ces trois équipes-là, dont on sait que l’on peut les attendre.
Et puis, après, vous avez aussi, toujours, les mêmes équipes. Le Japon. Qui, si elles jouent aussi bien que les moins de 20 ans, c’est sûr que « ça va être quelque chose ». Vous avez, aussi, le Brésil. Et puis, aujourd’hui, il n’y a plus de « petites équipes » ! Tout le monde progresse. Dans le monde entier, il y a de plus en plus de femmes qui jouent au football (il n’y a qu’à voir, à l’Euro 2017, aux Pays-Bas, comment toutes les équipes avaient progressé et que les matchs étaient fermés, car ça jouait serrer, tactiquement et des équipes comme la notre, la Suède, ou même l’Allemagne, qui ont été gênées, qui ont eu du mal à produire du jeu, et qui se sont faites sortir très tôt de la compétition). Donc, nous nous attendons à une compétition de très très haut niveau.
« Gagner cette coupe du monde, ce serait vraiment, pour mon cas personnel ».
C.E. : Si Amandine Henry – capitaine de l’équipe de France -, soulève, la première, le trophée, quelle sera votre première pensée ?
B.H. : Ce sera un aboutissement complet de ce que nous avions à faire, ici, à la fédération, avec Noël Le Graët, pour le football féminin. Et j’aurais une grosse grosse pensée pour lui. Mais aussi, bien évidement, pour mes proches qui m’ont permis de jouer, moi, dans des bonnes conditions, alors qu’il y avait, à cette époque, beaucoup de parents qui ne pouvaient pas. Mes frères, qui m’ont, aussi, mis le pied à l’étrier.
Mais, surtout, j’aurais une pensée d’accomplissement et de bonheur absolu ! Voir que, aujourd’hui, en France, l’on puisse gagner le trophée, pour les hommes et les femmes, dans le même temps, et dans le sport le plus populaire. C’est un sport qui, pour les femmes, était interdit dans la fin des années 1920, interdit dans les années 1930-40. Je me dirais qu’il y a vraiment beaucoup de chemin qui a été parcouru. Et, mon souhait le plus cher, sera que cela est pu être un symbole pour l’ensemble de notre société. Parce que l’on sait que, une société, en terme d’ouverture d’esprit, se mesure aussi à la place qui a été faite aux femmes. Et moi, ce n’est pas tant la « place des femmes » que je défends. C’est la mixité ! Parce que c’est quelque chose qui enrichi toutes les structures, qui enrichi les individus. Que ce soit la différence de genre, la différence sociale, la différence ethnique, etc… Pour moi, la différence, c’est vraiment un enrichissement. Et, gagner cette coupe du monde, ce serait vraiment, pour mon cas personnel, l’aboutissement de ce que j’avais à faire dans ma vie, pour ce sujet là, parce que c’est mon histoire. Et puis, aussi, pour le sport féminin, et pour un président qui aura permis, avec toutes nos équipes et avec tous nos élus.
« Il y a des choses, dans la vie, qui font que je ne me « projette » plus ».
C.E. : Vous avez déjà pensé à « l’après coupe du monde », pour vous ? Il y a t’il une éventualité de changement d’orientation professionnelle ?
B.H. : En fait, moi, je vis au jour le jour. Il y a des choses, dans la vie, qui font que je ne me « projette » plus.
Crédit photos : Christian Estevez
